Emmanuelle Stolar Vélon après la pluie…
Sculpteure Céramiste, Emmanuelle Stolar Vélon a découvert les arts du feu à l’occasion d’une visite professionnelle dans le cadre d’une mission de conseil qui l’amenait à recruter le Directeur de la Manufacture Baccarat. Venue sur le site de production elle l’a longuement visité, et « été transportée par le savoir-faire unique de ces ouvriers, par la passion qui les anime, par la beauté de chaque pièce sortant des ateliers. Ce fut un véritable coup de foudre devant le spectacle hypnotique des ouvriers créant leurs pièces. » Pour elle qui jusque là mêlait une carrière dans les ressources humaines à son activité de professeure de piano, c’est le début d’une véritable révolution.
Installée dans le Luberon où elle est entourée d’une terre aux multiples ocres, elle avoue qu’après son séjour en Lorraine elle découvre que « De retour dans le sud, plus rien n’avait de saveur. J’ai cherché comment apprendre, creuser, rencontrer les bonnes personnes. La suite, vous la connaissez. Je me suis formée chez mes mentors encore aujourd’hui. Je suis professionnelle depuis 5 ans, et je dois tout à Baccarat : ma passion pour la céramique (après tout, le cristal reste du sable, de l’eau, et des fours qui transforment la matière), ma rigueur, ma pugnacité des débuts pour être exposée. » Car désormais, loin de son piano, c’est la céramique qui lui sert de canal d’expression, et la terre qui devient le « support à ses recherches poétiques ». Elle va ainsi se former aux techniques de la céramique (tour, modelage) auprès de Danielle Casimiri ou encore au tournage et aux émaux haute température auprès de Marc Uzan.
Cinq ans après le début de ce cheminement, elle s’installe et aujourd’hui se consacre entièrement à la céramique. Ses journées se passent dans son atelier, « entre tour et four, terres et émaux ». « Une émotion, la chair de poule, lorsque j’ouvre la porte de mon four et découvre ma pièce terminée. L’harmonie entre la forme, son mouvement, et les couleurs de la terre ou des émaux après que la cuisson a fait son œuvre. J’aime que les couleurs vibrent, créent des paysages imaginaires devant lesquels on peut rêver. La cuisson des émaux à haute température permet cette fusion des couleurs qui crée la surprise. J’aime que les formes nous touchent, les courbes nous émeuvent et la sensualité affleure. Je laisse donc ma main être guidée par ce que je ressens lorsque je tourne. Pour moi, la beauté est plurielle, et plus instinctive qu’intellectuelle. Plutôt que de viser une certaine perfection formelle, je cherche donc à aller au bout de mes gestes et de ce qui les motive. »
Après la pluie… c’est pour elle « une histoire de renaissance, de vie qui reprend ses droits. Tout reste possible, même après la pluie. » Un sujet qui lui est essentiel, cette nature qui repart malgré tout, au-delà des accidents de la vie, est le fil conducteur de l’ensemble de son travail. Les pièces qu’elle présente sont nées durant les confinements et la période où il n’y avait plus de rendez-vous précis avec le public, plus aucune échéance pour les artisans d’art. Elle l’a vécu comme une opportunité « L’horloge s’est arrêtée, et j’ai dégusté chaque instant, en travaillant avec une lenteur qui m’a permis de créer des pièces que je ne referai peut-être plus jamais. »
Elle présente un ensemble de cinq sculptures en grès porcelainique – dont une installation de deux pièces. Pour les mettre en œuvre, elle a choisi
« après des années ardues de travail autour de mon tour pour maîtriser une technique très exigeante, presque capricieuse, le moment est venu de me détourner de son imposant dictat. Je reprends ma liberté, tout en respectant l’outil que j’utilise pour chacune de mes sculptures. Je m’émancipe. J’étire, je grave, je crée une nature qui reprend ses droits. » Ainsi, les pièces d’abord tournées, puis resculptées sont juste biscuitées (une seule cuisson « à 980°) et pour deux d’entre elles émaillées (une seconde cuisson à 1260°).